Milano | Mr. PRADA

Patrizio Bertelli

C’est le mari de Miuccia Prada, l’héritière de la famille du fondateur de Prada et la styliste du chic italien. Le Metropolitan Museum of Art de New York rend hommage à cette papesse de la mode, du 10 mai au 19 août dans une exposition intitulée “Elsa Schiaparelli et Miuccia Prada : conversations impossibles”. L’itinéraire, à deux générations près, de deux grandes dames de la mode, toutes deux avant-gardistes et inspirées.

Cette consécration n’est pas seulement celle de cette discrète et talentueuse Milanaise qui impose son goût au monde entier. C’est la leur. Ensemble, ils ont mené tambour battant la conversion de cette élégante entreprise de maroquinerie ouverte sous les arcades de la galerie Victor-Emmanuel-II de Milan en 1913.

A parts égales, ils incarnent Prada.

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The Prada brand dates back to the beginning of the last century. In 1913, Mario Prada opened a luxury store in the Galleria Vittorio Emanuele II in Milan, selling leather handbags, travelling trunks, leather accessories and beauty cases, luxury accessories and articles of value. Thanks to its exclusively designed goods, handcrafted using fine materials and sophisticated techniques, Prada rapidly became a point of reference for European aristocracy and the most elegant members of the haute-bourgeoisie in Europe.

In 1919, PRADA became an official supplier to the Italian Royal Family. Over the years, the Prada name gained increasing renown and prestige. The Group saw a turning point in the development of its activities at the end of the Seventies, when Miuccia Prada, Mario’s grand-daughter, launched a partnership with Patrizio Bertelli, a Tuscan businessman already involved in the leather goods sector with Granello and Sir Robert. This partnership combined creativity and business ideas to commence a new era.

In 1977, Patrizio Bertelli set up I.P.I. spa to consolidate the production resources that he had built up over the previous ten years, including those of Sir Robert and Granello. In the same year, I.P.I. spa obtained an exclusive license from Miuccia Prada to produce and distribute leather goods bearing the Prada brand name. In the following years, the activities of the two families were gradually brought together within a single Group and, in 2003, IPI spa was merged into PRADA spa.

In 1983, the Prada family opened a second store in the prestigious Via della Spiga in Milan. The new store showcased the new brand image as it blended traditional elements with a modern architectural setting and would represent a revolution and a benchmark for luxury retail. In response to the growing demand for and appreciation of Prada products, the range was extended from leather goods (such as bags, luggage and accessories) to include footwear, as well as men’s and women’s ready-to-wear apparel.

From 1986, new stores were opened in New York and Madrid, followed by London, Paris and Tokyo. The first Prada womenswear fashion show was held in Milan in 1988. In 1993, Ms. Miuccia Prada’s creative inspiration led to the establishment of a new brand ― Miu Miu ― designed for women who are particularly fashion-forward and interested in trendy and sophisticated fashion and lifestyle. Miu Miu now offers women’s ready-to-wear, leather goods and shoes, and is an increasingly important component of our Group’s sales. 

PRADA, cotée à Hongkong, affiche pour l’année 2011, 2,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires et un bénéfice net en hausse de plus de 72 % à 431,9 millions d’euros. Longtemps, les analystes financiers avaient renâclé devant l’endettement du groupe, sa diversification hasardeuse et onéreuse – avec les rachats loupés de Jil Sander et Helmut Lang -, ses multiples tentatives avortées pour entrer en Bourse, sa fragilité capitalistique ou ses mauvais résultats liés à la crise en 2009. 

Prada, depuis les premières cotations du titre en juin 2011, se sent pousser des ailes. Les riches clients d’Asie-Pacifique sont devenus son principal marché. Profitant à plein de la mondialisation, Patrizio Bertelli nourrit des ambitions colossales pour l’entreprise. Il a annoncé son intention de doubler le nombre de ses boutiques Prada d’ici cinq ans pour en détenir entre 650 et 750. Dans la mode, réussir, en couple, à bâtir un groupe, est un phénomène rare.

Pour Didier Grumbach, président de la Fédération française de la couture, “il faut systématiquement un conflit pour créer dans la mode. Donc dire au créateur que ce qu’il a fait ne marche pas”, mais il concède que Miuccia Prada “ne se trompe pas, même si elle saute du coq à l’âne” dans ses collections. Au bureau, ils travaillent ensemble comme des damnés. Elle l’appelle sobrement “Bertelli”. Elle a du talent à revendre et, lui, une intuition rare pour savoir ce qui va se vendre.

Né dans une famille d’avocats toscans, à Arezzo en 1946, Patrizio Bertelli a été élevé par sa mère à la suite du décès précoce de son père. Après des études d’ingénieur à l’université de Bologne, il crée une petite entreprise de sacs à main et de ceintures. En 1977, il rencontre celle qui deviendra son épouse et sous-traite pour Prada la fabrication d’articles de maroquinerie. Ils auront deux fils, Lorenzo, passionné de philosophie, et Giulio, adepte d’architecture. Leur père, cet ancien gaucher contrarié, a la réputation d’être un visionnaire qui se mêle de tout, un “obsessionnel encyclopédique”, dit un proche. Il connaît sur le bout des doigts l’histoire de la mode et appelle par leur prénom tous les artisans toscans qui travaillent pour le groupe. Il peaufine chaque nouvelle boutique avec les plus grands architectes de la planète, Rem Koolhaas ou le duo suisse Jacques Herzog et Pierre de Meuron. Patrizio Bertelli choisit la couleur ni céladon ni véronèse des murs verts des magasins. Un perfectionnisme digne d’un im-PRADA-tor.